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Photo du rédacteurEric Lacroix

Exclusif ! ITW de Xavier Thevenard pour Running Renaissance

Dernière mise à jour : 16 août 2021


@photos: Xavier Thevenard (On-running.com)


Nous avions le privilège de pouvoir avoir le soutien de Xavier ("Monsieur UTMB") pour le lancement de ce site "Running Renaissance". Nous avons donc repris ses propos, juste après la déception (relative) de l'annulation de l'UTMB 2020.

Car en effet, il existe des priorités selon lui, qui sont liées aux valeurs que l'on souhaite véhiculer dans notre pratique au quotidien, pour notre environnement, pour notre avenir.


Réflexions de Xavier pour Running Renaissance

Je trouve que la pratique de la course à pied est un acte de liberté très fort, une pratique

« décalée » car elle n’est pas du tout en phase avec notre société actuelle. Société toujours à la recherche de modernisme, de conformisme, du moindre d’effort, ... à l’opposé des valeurs des sports d’endurance.


Lorsque je cours, de nombreuses interrogations, me traversent l’esprit. L'une d'entre elles revient souvent. Aujourd'hui, nous sommes bien souvent focalisés sur ce qui nous satisfait.


Et nous agissons donc souvent, en grande partie par intérêt.


La réussite sociale, le matérialisme, l'individualisme, la course effrénée aux gains, hantent aujourd'hui notre quotidien. Ces valeurs sont devenues nos finalités. Ce sont les conséquences du conditionnement.


Or toutes ces valeurs symboliques à nos yeux, sont en inadéquation avec le fragile équilibre de la nature. Vouloir toujours plus, posséder d’avantage, ont un impact sur les ressources naturelles, qui s’épuisent inexorablement. La biodiversité souffre, l’humanité est en danger.


Je trouve que la pratique du trail, bien au-delà de l’activité physique par excellence, est aussi un bon moyen pour méditer, s’évader, analyser le monde qui nous entoure.

Cela permet de nous remettre en cause sur nos certitudes et de faire l'apologie des valeurs simples. Qui seront à mon sens indispensables à l’avenir pour l'intérêt collectif et l'épanouissement individuel.


Que choisirions-nous de valoriser, quels marqueurs souhaiterions-nous mettre en avant pour le futur ?

Je pense que si les symboles changent, les attitudes changeront et la société aussi.



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ITW complet (réalisé pour l'ouvrage Trail !)


Xavier, peux-tu te présenter rapidement ?

Je suis moniteur de ski et éducateur sportif l’été. J’habite à Jougne au cœur des montagnes du Jura. Ma passion sont les sports de plein air, et mes loisirs font référence à tout ce qui touche de loin comme de prêt au milieu naturel, passer du temps avec les copains, la famille, le travail du bois, la guitare...


Depuis combien d’années t’entraînes-tu ?

C’est dur de savoir depuis combien de temps je m’entraîne. Je dirais que je fais du sport depuis une dizaine d'années. Ce que j’aime particulièrement dans l’entraînement c’est de comprendre comment fonctionne son corps et comment il se comporte et réagit après différents types de sorties. J’aime bien analyser mon entrainement, mes sensations.


C’est pour cela que je tiens des carnets d’entrainement ou je note tous ce que je fais depuis l’âge de 10 ans. Avec à l’intérieur : les nombres d’heures d’entrainements, l’allure que j’utilise durant mes séances : (seuil, VMA, endurance fondamentale…etc.), des sensations sur échelle de 0 à10 (0 pas d’énergie, 10 le top du top), un commentaire sur mon humeur ou les différents ressentis, la météo, avec qui j’étais…


Alors je dirais que j’ai un mode de fonctionnement pour essayer de progresser dans le sport depuis l’âge de 10 ans. Mais le carnet d’entrainement est aussi un moyen pour moi de garder en souvenir mes différentes sorties comme un journal intime.


Pourquoi ce choix de t’entrainer autant ? Quel plaisir y trouves-tu ?


Il y a plusieurs raison pour laquelle, je m’entraine beaucoup. Je distingue cinq sources de motivations principales: Contemplation, Compétition, Performance, Santé, Addiction.

  • Il y a l’aspect contemplation, être dehors dans la nature regarder les paysages, voir évoluer les saisons, écouter ce qui nous entoure est vraiment un plaisir. Je trouve qu’il n’y a rien de plus fort que l’association de l’effort physique avec la contemplation d’une nature éclatante. C’est un sentiment de liberté très fort.


  • Il y a le côté compétition. Je suis un compétiteur, j’aime aussi de temps en temps me comparer aux autres. Surtout me confronter à moi-même, me prouver que je peux arriver à faire un temps sur un parcours, rechercher, trouver ces limites, voir jusque ou, je peux pousser le corps. J’aime mettre le dossard sur le dos. la reconnaissance à travers La compétition m’importe peu, même si le soutien et les encouragements des proches ou des spectateurs, me donnent des frissons sur les différentes compétitions. C’est d’ailleurs réciproque, quand je vois un de mes proches entrains de m’encourager avec la banane, alors j’aurais à mon tour le sourire, à condition que tout aille bien !


  • La performance est aussi une source d’inspiration. Essayer de maitriser les différents paramètres de l’entraînement, trouver son idéal de vie, tenter d’arriver le jour d’une course le mieux possible physiquement et physiologiquement, c’est aussi une motivation. L’entraînement pour parvenir à un objectif, essayer d’être dans les meilleures dispositions possibles le jour j, c’est comme un jeu. Celui qui est d'essayer chaque jour d’être un peu meilleur avec soi-même, d’être rigoureux, d’être minutieux sur les différents aspects de la préparation : (physique, psychique, nutrition, récupération, trouver son équilibre avec ces proches), et ça c'est c’est réussir à 90 % sa course. Car quoi qu’il en soit, je pense que le travail paye toujours. Mais le primordial pour parvenir à faire une performance c’est d’avoir l’envie et surtout d’être content, heureux de pouvoir courir de pouvoir partager et découvrir un nouvelle endroit. D’arriver à contrôler à maitriser tous ces différents aspects de la performance, c’est nécessaire pour arriver à son but car le gain de confiance en soi est très fort. Mais il n’y a que l’expérience qui permet petit à petit d’interpréter ces différents aspects de la performance. La patience, la volonté est fondamentale pour réussir.


  • La santé à travers le sport est aussi quelque chose pour moi d’important. Prendre soin de son corps, se sentir bien dans sa peau en pratiquant une activité sportive fait partie de mon équilibre physique et phychologique. J’éprouve un tel plaisir à bouger, que je n’ai rien trouvé de meilleur, jusqu’à aujourd’hui qui me rend si heureux dans la vie de tous les jours. Même si on peut se poser la question de savoir si la pratique du sport à haute dose est bon pour la santé ?


  • Aujourd’hui il y a une chose que je conçois, c’est que la pratique de la course à pied à haute dose devient une véritable addiction, cela devient un besoin comme de se alimenter au quotidien. Il faut juste en avoir conscience pour ne pas tomber dans le surentrainement et pour ne pas se couper de la réalité et de ces proches.

Le trail a pas mal évolué ces dernières années et la préparation aux épreuves nécessite une approche beaucoup plus spécifique entre le kilomètre vertical ou l’ultra (on peut parler notamment de trail de montagne), qu’en penses-tu ?


Oui je pense que pour performer à la fois sur des kilomètres verticaux comme sur de l’ultra trail c’est compliqué aujourd’hui. Faire des kilomètres verticaux dans le cadre d’une préparation pour un Ultra c’est plus envisageable que l’inverse. Aujourd’hui on le voit dans l’évolution d’autres sports qui se professionnalisent comme le ski de fond.


Par exemple : il existe des épreuves de sprint (3km), des épreuves plus longues (30 à 50km). On remarque que les fondeurs sprinteurs se sont vraiment spécialisés sur leurs distances car ils ne sont jamais présents sur les courses d’endurance. Par contre les fondeurs sont plus performants sur les épreuves d’endurance et se confrontent aux sprinteurs, et parfois, ils arrivent à tirer leurs épingles du jeu. Je pense que le trail en prend cette direction.


Après tout dépend de ce que l’on souhaite faire. L’important est de se faire plaisir, dans la distance que l’on aime le plus.


Quelle est/sont pour toi la/les séance(s) spécifique(s) d’entrainement trail que l’on ne retrouve pas dans des entraînements classiques comme en course sur route ?


A vrai dire comme je viens du milieu du sport outdoor (kayak, trail, escalade, ski de fond), je n’ai pas tellement de notion concernant la préparation et l’entrainement sur course sur route. Mais je dirais qu’il y a un type de sortie qui est indispensable pour pouvoir ce faire plaisir et progresser en trail, c’est de faire du dénivelé positif. Sur des sorties longues comme sur des séances plus spécifiques type fractionné.


Que penses-tu de la méthode d’entrainement holistique qui propose 6 facettes complémentaires (Renforcement, alimentation, intensité, dénivelé, endurance, régénération) ?


Je trouve que ces thématiques sont indispensables pour la préparation et progression en trail. À mon sens, l’alimentation est un peu la clef de voute de ces 6 principes.

Car en ayant une bonne alimentation au quotidien, on va avoir, une meilleure récupération, une bonne régénération musculaire, une amélioration de la qualité de son sommeil, un moral d’acier, une humeur toujours au top. Ce qui va forcément influencer directement la qualité de son entrainement. Que l’on fasse du dénivelé, de l’endurance de l’intensité. Prendre les bons aliments, au bon moment de la journée, en fonction de son entrainements, avant, pendant, après, ne va avoir la même répercutions sur l’organisme. Je pense que si cela est fait correctement, les effets sur son entrainement, sur sa santé physique et mentale peuvent être très bénéfiques.


Toi qui prône l’importance de la préparation physique, que penses-tu de l’entraînement croisé ?


L’entrainement croisé est à mon avis indispensable pour perdurer dans la pratique du trail. J’y trouve plein d’intérêt à diversifier ses sorties, son entrainements :

  • Déjà je trouve que l’activité de la course à pied est traumatisante au niveau musculaire et articulaire. On ne pourra pas dire le contraire. On voit bien que c’est une des disciplines où il y a le plus de blessures. C’est pour cela que la pratique d’une activité sportive qui est portée, telle que le vélo ou le ski de fond est, à mon avis, indispensable pour régénérer le corps. On risque moins de se blesser.


  • Être polyvalent dans ces activités sportives peut aussi permettre à son corps et à sa tête d’apprendre et d’engranger de nouveaux types de sensations qui peuvent nous aider dans notre sport favori. Des sensations comme l’agilité, l’équilibre, l’aisance, l’engagement ... tout cela peut nous faire progresser, comprendre des ressentis différents que nous ne percevons pas dans notre activité principale.


  • Enfin, je pense que d’être mono-activité n’est pas tellement bon pour la motivation. Diversifier ses activités sportives, c’est ne pas tomber dans la monotonie.


Est-ce que l’approche mentale est pour toi un facteur important de la performance ?


Cela est à mon sens, indispensable à la réussite d’un objectif. Je trouve qu’aujourd’hui on analyse trop les défaites, les échecs. Dans le sport, comme dans la vie de tous les jours.

En se disant : « qu’est ce qui n’a pas marché », « Pourquoi ça, n’a pas été aujourd’hui »…

Oui peut être qu’il faut le faire, avec plus ou moins de recul.


Mais surtout il faut analyser les victoires, les courses qui se sont bien déroulées. Arriver à reproduire le schéma qui nous correspond, en se posant les bonnes questions, afin d’arriver le plus régulièrement possible à être dans les meilleures dispositions le jour J.

C’est fondamental, pour réussir son objectif.


C’est pour cela que de noter les détails, les ressentis, la situation dans laquelle nous étions les bons jours, comprendre ce qui a pu faire pencher la balance en sa faveur c’est important pour arriver à être constant dans ses performances.


Je pense qu’avant tout, il faut travailler ses points forts, avant de travailler ses points faibles. Car en réalisant ce procédé à soi-même on excelle dans ses points forts.

Et surtout toujours être optimiste, car c’est voir une opportunité dans chaque difficulté, alors que d’être pessimiste c’est de voir une difficulté dans chaque opportunité.

Je crois beaucoup à l’imagerie mentale, et aux pouvoirs de l’intention.

Par exemple, sur mes différents parcours de trail, quand j’arrive sur un chemin bien particulier, je vais avoir une pensée qui me rappelle un bon moment. Cela peut être, une victoire, une histoire d’enfance qui me donne le sourire, ou un moment de partage avec les amis, la famille. Ces différentes images me font du bien.

Donc avant des gros objectifs je vais volontairement sur ces différents sentiers pour me souvenir de ces pensées positives, afin d’avoir un maximum d’énergie favorable dans la tête.


Peux-tu nous donner une semaine type d’entrainement impressionnante en termes de charge de travail que tu as déjà réalisé ?


J’aime interpréter la charge de travail en nombre d’heures d’entrainement et non en kilomètres. Car l’hiver, je ne cours pas ou très peu, je fais du ski de fond. Les kilomètres de course à pied en montée ou sur le plat sont complétement différents. Les effets de la fatigue sur le corps, entre du vélo et de la course à pied, ça n’a rien à voir.

Tout ça pour dire, qu’une bonne charge d’entrainement lors d’une semaine, c’est associer à la fois du volume et de l’intensité, tout en enchainant les sorties. J’adore !


Un outil indispensable à mon sens pour faire une semaine de charge de qualité, afin de ne pas tomber dans la fatigue extrême, ou savoir si il nous faudrait plus une séance d’endurance fondamentale ou d’intensité, c’est l’interprétation des variation de fréquence cardiaque au quotidien.


Un exemple de semaine grosse charge (préparation UTMB)

Lundi: Matin : 3h de CAP (~1500m+) Endurance fondamentale

AM: 2h de VTT Endurance

Mardi: Matin: 2h de CAP (1h d’échauffement +10 à 12 x 2’/1’ en côtes + 30 min de récup)

AM: 2h de Vélo Endurance

Mercredi: Matin: 2h de CAP à jeun

AM: 2h de kayak de ligne (PPG naturelle)

Jeudi: 2h de CAP (1h d’échauffement +15 x 1’/1’ en côtes+ 30 min de récup)

AM: 1h de vélo cool

Vendredi: Matin: 3h de VTT Endurance

AM: 2h de CAP en Endurance

Samedi: Matin: 2h30 de CAP (1h d’échauffement +3 x 15’/3’ en côtes+ 40 min de récup)

AM: 2 h de CAP en Endurance

Dimanche: Matin:3h à 4h de vélo

Volume total horaire : 29h à 30h


Peux-tu nous donner la recette qui à tes yeux te parait la plus adaptée pour parvenir à de tels résultats en compétition ?


L'adaptation de l’entrainement au quotidien. Je pense que pour arriver dans les meilleures dispositions le jour J au niveau physique et mental, il faut se faire un programme d’entrainement assez général, et différencier les semaines de charge des semaines de récupérations, pour avoir les effets de la surcompensation le moment voulu.


Mais pendant sa semaine de charge ou sa semaine de récupération, il ne faut pas être bête et méchant à vouloir exécuter ce que l’on s’est imposé à l’entrainement. Je pense qu’en ayant cette démarche on va droit dans le mur.


Par exemple : si le mardi j’avais programmé une séance d’intensité, mais que durant mon échauffement je n’ai pas de sensations, alors je vais opter pour une séance plus cool en endurance fondamentale, et je fixerais ma séance d’intensité plus tard dans la semaine.

Car à mon sens de faire une séance d’intensité en étant déjà bien entamé physiquement, ne me sera pas bénéfique. Je vais mettre plus de temps à récupérer et ma séance sera moins efficace que si j’étais bien.


À l’inverse, si j’ai programmé une sortie plus cool le jeudi mais que j’ai les watts, alors la séance de seuil que j’avais programmé le samedi et bien je vais la faire aujourd’hui.

Je pense qu'aujourd’hui on veut trop faire des calculs mathématiques avec l’entrainement en établissant précisément des programmes d’entrainement clairs et nets, avec un nombre de dénivelé accumulé, un nombre de répétitions, une plage de fréquence cardiaque à ne pas dépasser. Alors pourquoi pas.... Mais il ne faut pas tomber dans l’extrême !

Ne pas oublier avant tout que l’entraînement ce sont des sensations, du psychique et de l’expérience.


Quelle-est pour toi la plus grande satisfaction en tant qu’athlète ?


D’accomplir un objectif, un rêve que l’on s’était fixé, avec en amont une grosse préparation ou la patience et le travail étaient indispensables à la réussite de ce bonheur.


C’est de vivre tout simplement un moment unique, un moment humain, plein de partage, des émotions fortes qui resteront gravés à jamais dans sa tête. Profiter du moment présent, "ici et maintenant". Pour que ces émotions et ces satisfactions se transforment en des histoires éternelles.







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